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19/08/2010 |

Rentrée des classes (suite)

Pour un début, nous avons choisi une tombe repérée l’an dernier. Choix dicté par sa proximité du hameau et quelques critères que je vous épargnerai car ils ne sont pas systématiquement fiables. L’avenir devait nous donner raison sur ce dernier point.  La proximité du hameau, choix qui n’a rien à voir avec ces fameux critères, fut déterminante l’idée de partir dans une température que nous appellerions frisquette pour une marche de plusieurs kilomètres le jour de notre rentrée des classes ayant été rejeté à l’unanimité. Après une procédure que je vous imposerai peut être un jour dans un digest d’archéologie sibérienne, nous mimes au jour une tombe d’enfant non gelé, inhumé selon une tradition ancienne mais avec une croix chrétienne autour du cou renvoyant aux débuts du 19e siècle. Type de tombe que nous ne cherchons pas mais que nous retrouvons dans environ un tiers des cas, leur faible profondeur et leur isolement étant en tous points semblables aux tombes antérieures du 17 e siècle que nous appelons de nos vœux. IMG_0283 Cette confusion est liée au fait que l’inhumation des enfants fut l’un des premiers signes de christianisation de la Iakoutie ; auparavant ils étaient déposés dans des arbres ; par la suite ils le furent dans des cimetières. L’opération était bouclée vers trois heures de l’après midi et l’ensemble de l’équipe décida, non point de rentrer à la maison, c'est-à-dire au hameau où la Yana à 15°C l’attendait pour une joyeuse partie de natation rapide (très très rapide), mais de foncer vers le second site repéré. Pour moi qui vous décris 24 h après ce qui fut l’une des premières erreurs tactiques de notre mission je n’y vois qu’une explication : le jour de la rentrée des classes, le bon élève ne peut pas accepter les cinq  fautes d’orthographe de la dictée (je vous parle d’une époque ou on en faisait encore) proposée par l’enseignant un peu sadique pour vérifier son niveau. Ne sachant pas qu’il est encore en vacances et n’évaluant pas le niveau de la nouvelle section, il proteste et se voit imposé un problème de maths qui tourne lui aussi à la débandade. La rentrée est un peu loupée et même si les copains sont sympathiques, c’est différent de l’an dernier et  il va falloir changer de technique et travailler peut être un peu plus. Compte tenu de la gestion de notre attirail, la distance de 3,6 km qu’indiquait le GPS entre les deux sites devait être parcourue en une heure. C’était sans compter sur les bras morts de la Yana à traverser sur des arbres abattus ou sur des bacs autochtones prévus pour les faucheurs, les méandres qui multiplient par quatre les distances, les mouillères de fond  de prairie qui remplissent les bottes, l’absence de chemin qui oblige à passer à travers les forets de mélèzes encombrées d’arbres abattus (ils ne pourrissent pas) et bombées par le permafrost avec des fentes de gels dissimulées sous d’énormes épaisseurs de lichens. Comme disent les Aveyronnais quand ils sont pris dans des taillis de buis et de ronces, nous avons bartassé pendant cinq heures. Assez de cette litanie de difficultés, ces efforts ne furent pas vains. Le site fut finalement atteint et la tombe repérée l’an dernier,  alors que les bras morts et les mouillères étaient à secs, fut retrouvée et le matériel déposé. Le retour permit de baliser un chemin dont les paysages sont dignes des meilleurs GDR européens. Fourbus et ampoulés pour certains nos sacs de couchage arctiques fournis par l’IPEV firent l’unanimité au petit déjeuner du jour suivant. Avec 28°C hier après midi nous ne nous attendions pas à trouver tant de gelée et un tel froid durant la nuit. Nous sommes passés dans la section supérieure par rapport à la Iakoutie centrale. Nous le savions, mais nous l’avons réalisé. La classe peut commencer.

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EC


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