Pour paraphraser
un pêcheur à la truite fameux je dirai que je fouille parce que j’aime
fouiller ; parce que j’aime ces moments de découverte et d’excitation
intellectuelle intense même s’ils sont précédés de longues phases de
préparation et parfois suivis inévitablement de moments de déception, vite
oubliés car suivis de nouveaux espoirs. J’aime les lieux splendides où nous
sommes passés et les personnages que nous y avons rencontré. J’aime suivre
Vassili au soleil couchant lorsqu’il m’entraine vers l’une de ses nouvelles
découvertes, une tombe, il en est certain, extraordinaire, à fouiller dès
l’aube, dans quelques heures. J’aime arriver sur un plateau et y découvrir
surplombant une rivière, un tombeau médiéval, une fosse, un lieu d’autrefois.
La fouille est pour moi une inépuisable source de joies et de connaissances et
à un moment ou tant d’entre nous perdent leur vie dans la mise au point de
théories bâties sur du déjà connu ou sur des hypothèses guères étayées, la
fouille renouvelle nos connaissances, notre vision du monde, du passé, de
l’environnement mais aussi des autres. Si la Sibérie, terre exotique pour nombre d’entre nous,
a été l’occasion de ce blog, la joie a toujours été la même, en Egypte avec
Béatrix, en Mongolie avec Pierre-Henry, mais aussi près de Carcassonne quand
Henri nous apprenait les bases de l’ostéologie et Jean Guilaine celles de
l’archéologie, sur le Larzac avec Rémi et l’ami Jean lorsque nous fouillions
une sépulture collective et trouvions des tumulus par dizaines, en milieu
urbain, à Montpellier lorsqu’avec Jean-Claude Hélas nous nous lancions dans la
fouille des cimetières médiévaux, à Toulouse lors de la fouille d’enfeus et
dans la vallée du Rhône lorsqu’avec Alain Beeching m’initiait aux fouilles
extensives lors de ce que l’on appelait encore « l’archéologie de
sauvetage ». Chaque terrain apporte ses joies, ses découvertes, ses
déceptions, ses à côtés qui constituent « le voyage ». Des histoires
de chamans m’ont été racontées en tous lieux mais je ne les ai saisies qu’en
Sibérie, à la tombée du jour lorsque celui qui les disait, sobre et sincère,
commençait par « la nuit dernière, j’ai entendu les tambours… ».
Quant à la bière, qui remplace si bien l’eau bouillie des petits lacs croupis,
elle restera, jusqu’au bout du chemin, délicieuse servie dans un gobelet en fer
émaillé à la lueur d’un feu de camps.
EC
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