La guerre de la breloque et du scalpel
Entre Kiki, dessinatrice haut de gamme, qui « crobarde » et dessine plus vite que son ombre, mes collègues archéologues et moi, les discussions sont parfois houleuses mais toujours empruntes de respect. Les nœuds m’intéressent lorsqu’il s’agit de liens de strangulation, de pendaison, de ligotages, mais les nœuds dit de couturière beaucoup moins et y donner un grand coup de scalpel pour accéder plus rapidement au cadavre ne m’aurait pas fait battre un cil. Mais il a fallu composer. Les tissus, les coupes de vêtements, le type de boutonnage, la succession des couches, etc., revêtent pour mes collègues une importance tout aussi grande que pour moi les traces de poudre péri-orificielles ou un vêtement perforé, déchiré, voire remis à l’envers. Et voici que l’évolution du natasnik (slip) du 17e au 18e siècle en Sibérie, sous les explications pointues de Kiki et corrélées à quelques examens gynécologiques (si, si je vous assure, certains hymen momifiés ont encore parfois quelque chose à raconter), le natasnik donc s’en vient titiller ma curiosité. Alors, je rentre en formation continue sur les nogovitse (jambières), les accroches en breloque façon porte-jarretelle, les pièces montées de manteaux en fourrure, les fermetures de ceux-ci à droite, à gauche, au milieu, les chapkas (bref, la liste est longue, très très longue !). Et vint Le grand moment pour moi, une découverte : la perle avec un grand P ou les perles avec un grand L, des bleues, des noires, des blanches, des petites, des rondes, de allongées, des en métal qui ornent les vêtements sibériens avec un seul mot d’ordre : jamais seules mais toujours groupées, et quand je dits groupées c’est non pas par dizaines mais bien par milliers, bref à en cauchemarder la nuit ! Et j’ai appliqué à la « perlouse » les rudiments de la médecine légale : la bonne vieille dissection plan par plan. Et ma côte a considérablement remonté dans l’appréciation de mes collègues qui au départ, redoutaient souvent, pour ne pas dire toujours, de me voir approcher avec mes scalpels et mon couteau. La guerre de la breloque et du scalpel n’aura pas lieu.
A. G.
Chroniques de Targana
A notre arrivée
à Targana, le campement comptait 23 âmes, certains vivant ici çà demeure,
d’autre pour les vacances d’été ou selon Iena (récemment veuve) ce séjour
permet de décompresser. Ce terme me parait difficile à cautionner, tant
l’organisation du quotidien me semble compliquée. Le robinet d’eau claire c’est
transformé ici en rivière en contrebas, l’approvisionnement étant effectué par
un gros bidon monté sur roulettes qui nécessite une certaine énergie pour
arriver jusqu’à la cuisine. L’eau qui après de gros bouillons nous parvient
plus ou moins claire suivant les jours à un goût qui nous a conduit de plus en
plus à apprécier la bière. Une après midi passée en compagnie des femmes,
quelques mots d’anglais, un cahier et un crayon m’ont fait comprendre, que la
vie ici bien qu’elle soit rude semble source d’un certain épanouissement dans
la mesure où partage et entraide sont à leur organisation sociale ce
qu’individualisme et méfiance sont à la notre. Je n’irai pas jusqu’à parler d’un
petit paradis sur terre mais les enfants semblent heureux de patauger dans la
gadoue, gambadent, crient, jouent. Les maisons du hameau sont constituées de
cubes en vois (
A.G.
Rédigé par : Vinyj | 06/09/2010 à 10:04
Merci pour les petits clins d'oeil sur votre quotidien qui, visiblement est "un tantinet" rude! Bon courage pour la fin.