Pour en finir avec la domination masculine
L’égalité des sexes est un très long combat où les livres jouent un rôle décisif. On se souviendra de Parité ! de l’universitaire américaine Joan Scott (traduction française en 2005, Albin Michel, 255 p., 24 €). Ilana Löwy et Catherine Marry, qui ont déjà publié de nombreuses études sur les relations de genre, proposent cette fois un lexique particulièrement efficace (Pour en finir avec la domination masculine. De A à Z. Paris, Les empêcheurs de penser en rond, 2007, 346 p., 20 €). Il s’agit de déconstruire tout une série de préjugés sur lesquels est fondée depuis fort longtemps la domination masculine. Et le moyen utilisé est d’historiciser et de révéler la construction sociale sur laquelle repose toute une série de différences qualifiées couramment de « naturelles ». Chaque court article décortique des notions et des attributs qui sont plus particulièrement rattachés aux hommes ou aux femmes (la « musculation » et les « concours de laideur » pour les premiers, les « cosmétiques » et les « concours de beauté » pour les secondes). Chaque entrée est aussi l’occasion d’offrir au lecteur des références de travaux récents sur lesquels elles s’appuient, ainsi ceux qui démontent l’idée que les filles n’auraient pas la bosse des maths. L’exclusion des femmes de certaines institutions (comme l’église catholique) ou de certains univers (comme le jazz), les dissymétries sexuées en matière d’amour, ou encore, les âges de la vie, constituent autant d’occasions pour observer les mécanismes sur lesquels repose la domination masculine. D’autres notions, comme l’homosexualité ou le travail domestique sont traitées tour à tour du point de vue masculin et du point de vue féminin : on apprend ainsi qu’en France « en 13 ans (de 1986 à 1999), les hommes ont accru de 11 minutes par jour leur participation aux tâches domestiques : ils bricolent et jardinent plus » ! La vitalité de l’ouvrage repose sur l’audacieuse association entre idées reçues et apports des sciences sociales, démontrant que l’égalité entre les hommes et les femmes est un horizon encore lointain.
Isabelle Backouche, EHESS
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