La grande famine en Chine
« Les
pages que l’on va lire ont terribles, effroyables même », écrit Louis
Vincenolles, le traducteur principal de Stèles.
La grande famine en Chine, 1958-1961¸de l’historien chinois (de Hong Kong)
Yang Jisheng, dans un avertissement assez inédit. C’est dire qu’éditeurs et
traducteurs ont noué un rapport étroit avec cette œuvre si nécessaire pour
dire, témoigner et expliquer une tragédie sans équivalent : en 1958 et
1961, 36 millions de Chinois sont morts de faim dans le cadre du « Grand
bon en avant » qui provoqua un désastre humain total. Une violence
absolue se répand sur les campagnes et les populations rurales, victimes de la
folie idéologique des dirigeants chinois, Mao Zedong en tête. Yang Jisheng a
effectivement érigé, avec son livre dont la version chinoise est considérable
(mille deux cents pages), une stèle, en mémoire de son père mort de faim en
1959, à toutes les victimes de la grande famine, au système qui a provoqué
cette catastrophe, enfin à lui-même qui s’est plongé jusqu’à l’épuisement dans
un défi personnel, moral et heuristique lui-même total. Contre un pouvoir
totalitaire, muré dans sa démence criminelle et la négation de ses actes, la
matérialisation de la mémoire est une arme aux mains des peuples. « J’érige
ces stèles précisément pour que les gens se souviennent de cette catastrophe
provoquée par l’homme, de ces ténèbres et de ces crimes, afin qu’à l’avenir on
ne les reproduise pas ». (671 p., 28 €).
Vincent Duclert
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