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23 août 2010 |

Sur les origines de l'effet de serre et du changement climatique

Blog grine
Svante Arrhenius, Thomas C. Chamberlin, James Croll, Joseph Fourier, Claude Pouillet, John Tyndall, Sur les origines de l'effet de serre et du changement climatique, Paris, La ville brûle, 2010, 277 p., 25 €
 
Avec deux remarquables préfaces, l'une d'Edouard Bard, du Collège de France, l'autre de Jérôme Chappellaz, du Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement de Grenoble, deux chercheurs chevronnés et bien connus pour leur sens de la responsabilité sociale des scientifiques et leur talent de communicateurs, cette anthologie de textes du XIXe siècle publiée par une jeune et courageuse petite maison éditions française ne devrait pas laisser indifférent. Elle devrait intéresser non seulement les amateurs d'histoire des sciences mais encore les milieux de l'éducation et de l'enseignement supérieur, car l'histoire des sciences, comme le disait Goethe, c'est la science elle-même, la science en marche, la recherche en train de se faire. Ce genre de textbook est encore assez rare pour la physique cosmique et la climatologie du XIXe siècle, c'est-à-dire du début de notre révolution thermo-industrielle. Curieusement, la théorie de l'effet de serre, y compris de l'interférence de l'activité humaine, et des changements climatiques dans l'histoire géologique de la Terre possède, grosso modo, la même chronologie historique et le même gradient de croissance que la Révolution Industrielle bien comprise, c'est-à-dire à l'échelle du système Terre.

L'originalité et l'utilité de ce volume broché de bonne facture, à la typographie très agréable, me semblent de bon augure pour la diffusion (a priori un peu difficile) d'un tel travail de traduction. Il faut bien le reconnaître, ce genre d'ouvrage ne court pas les rues, ni même les couloirs de nos facultés (des sciences ou des lettres). Pour la Fac des lettres, Fourier ou Arrhénius, c'est de la science, pas de la littérature! Pour la Fac des sciences, Tyndall ou Chamberlin, c'est maintenant de la littérature, plus de la science! La réalité historique et épistémologique ne cadre plus avec nos catégories et représentations actuelles. Mais
c'est justement pour cela qu'il vaut la peine de relire les fondateurs, les classiques d'un grand débat scientifique, et non de la plus grande escroquerie intellectuelle du siècle, comme le proclament les climato-sceptiques qui ne connaissent pas cette histoire de l'effet de serre qui a les dimensions de notre civilisation thermo-industrielle!

Pour ma part, je n'ai qu'un souhait après cette lecture (une relecture en fait, car cela fait plus de vingt ans que je m'intéresse à cette passionnante histoire) : que cette anthologie sur la découverte des changements climatiques et du rôle de l'effet de serre dans l'histoire géochimique de notre « Biosphère dans le cosmos » (V. Vernadsky) soit suivie d'un second volume qui rassemblerait les pionniers de la dérive anthropogénique de l'effet de serre à partir de l'Année Géophysique Internationale (1957-58), comme Gilbert Plass, Roger Revelle, Charles David Keeling, Lester Machta, Bert Bolin, Jule Charney, William Kellogg, et encore d'un troisième volume, avec les découvertes extraordinaires des glaciologues comme Will Dansgaard, Hans Oeschger ou Claude Lorius, et beaucoup d'autres dont le grand public ignore encore les contributions à la nouvelle science du système Terre.
Jacques Grinevald, IHEID, Université de Genève

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Commentaires

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Cette étude épistémologique est sûrement fort instructive. Mais n'oublions pas que la théorie de Svente Arrhénius a été fort critiquée par les physiciens de l'époque et est tombée dans les oubliettes, avant de ressortir de sa tombe fort opportunément dans les années 80. Le processus de l'effet de serre en milieu confiné ne peut être étendu à toute la planète : le verre ne fait que renvoyer les IR selon les lois de l'optique (et le verre ne s'échauffe pas), tandis que les gaz triatomiques (ou plus) absorbent les IR provenant du sol, s'échauffent, et réémettent des IR dans toutes les directions (et pas uniquement vers le sol, ce qui violerait la seconde loi de la thermodynamique).Le terme d'effet de serre est donc inapproprié. En outre, le rôle pivot accordé au CO2 par le GIEC est un postulat qui n'a jamais été validé par les données d'observation, et la signature de l'effet de serre du CO2 n'a jamais été observée... Donc, prudence, ne concluons pas trop vite que la seule vérité serait le paradigme du RCA....

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