La cinquantaine bien tapée
En quoi ce roman, dont certaines pages s’apparentent à celles d’un traité sur la fellation, intéresse-t-il les lecteurs du Blog de La Recherche ? (Denoël, 160 p., 17 €). Outre qu’il semble réveiller notre libido toujours étouffée par la vie moderne et la suite des tâches ininterrompues, le livre nous suggère trois intérêts. Derrière le pseudonyme de Julie Saltiel, « née à Paris. Normalienne et agrégée de philosophie, elle enseigne à la Sorbonne * », se cache une autre universitaire. Une, vraisemblablement, car la « parabole contemporaine sur la condition féminine » que nous offre le livre découle d’un intérêt féminin, le genre masculin n’étant guère intéressé par le destin de l’autre (en même temps, la romancière brouille les cartes avec l’ambivalence des prénoms de ses principaux protagonistes, de Gaëlle à Raphaël). Universitaire certainement : font sens le style d’écriture, l’univers professionnel décrit (JS étant la narratrice) et les références philosophiques introduisant chaque nouveau chapitre et puisées aux sources des meilleurs corpus, de Marc-Aurèle à Bergson en passant par Descartes, Kant ou Rimbaud (« Je est un autre »). Et voici le second intérêt du livre, ce désir de méditation qui le parcourt et l’enveloppe d’un je-ne-sais-quoi-de-philosophique. Enfin, le projet même du roman mérite qu’on s’y arrête, à savoir que les expériences de l’amour physique ouvrent au plus profond de soi et révèlent les vérités les plus essentielles de l’existence individuelle. La torride citation qui introduit le roman, extraite des Poèmes érotiques de Georges Bataille, est très éclairante à ce sujet …… L’intention heuristique est donc clairement constituée. Maintenant, est-elle réalisée au fil des pages ? Pour ma part, je n’ai été pas été conquis par le roman mais j’en reconnais l’intérêt dans ce post dominical et printanier !
Vincent Duclert
* La fiche du service de presse des éditions Denoël indique pour sa part qu’elle « enseigne à l’Ecole pratiques des hautes études ». Vérification faite, il n’y a aucune Julie Saltiel dans l’une et l’autre de ces vénérables institutions. Qui se cache alors derrière ce pseudonyme ? Tout Paris bruisse de ce mystère ?