Tout sur tout et son contraire
La petite baleine porte-clef(s) ornant l’opuscule devrait mettre la puce à l’oreille de l'érudit : parodie assumée de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, cette caustique Anticyclopédie universelle (Mille et une nuits, 2008, 126 p., 15 €) est un joli objet subversif qui s’adresse au curieux sommeillant en chacun de nous. Ah, toutes ces questions qu’on a bien eu tort de ne point se poser ! Dans la lignée des Miscellanées de Mr. Schott, E. Vincenot et E. Prelle s’engouffrent dans un enchevêtrement A à Z made in Absurdie de notions historiques, scientifiques, spirituelles, philosophiques et artistiques qui permet à un joyeux second degré de balayer toutes les poussières muséales de l’épistémologie classique.
Si, fidèles au principe réversible de la pétition de principe, les habiles auteurs empêchent par leur préambule qu’on les critique en les prenant au sérieux, on regrettera simplement que certaines notions ne soient pas davantage approfondies. Car l’Anticyclopédie, au demeurant bien servie par moult illustrations, occupe une autre fonction quand, délaissant la caricature de la traditionnelle connaissance mise en cercle (enkyklos en grec), elle se transmue en l’abécédaire, aussi déjanté que fantastique, d’un monde parallèle au nôtre, ainsi convertie en phantasme tantalien d’un chercheur obnubilé par les arcanes de toutes choses. Bref, un « dictionnaire déraisonné des sciences, des arts et des mœurs » qui se parcourt plus qu’il ne se lit (au sens littéral en tout cas), mais fort savoureux le plus souvent.
Frédéric Grolleau, lelitteraire.com
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