Le pari démocratique
Les « valeurs » sont une importante question en sciences sociales, désignant « ce à quoi nous tenons », écrivent Alexandra Bidet, Louis Quéré et Gérôme Truc, traducteurs et introducteurs de La formation des valeurs de John Dewey aux éditions des Empêcheurs de penser en rond/La Découverte (237 p., 17 €). Soit un ensemble de textes du philosophe progressiste américain né en 1859, mort en 1953, et dont le credo philosophique [« voir quelle lumière les idées des hommes pouvaient apporter sur les questions de leurs époque », selon le critique Henry Steel Commager en 1950] éclaira tous les problèmes d’importance de son époque. Plus près de nous, Rorty considérait Dewey comme son « héros en philosophie » et comme un des philosophes les plus importants du XXe siècle, rappelle Patrick Di Mascio qui traduit et introduit pour sa part un autre livre de Dewey chez le même éditeur, Une foi commune (A Common Faith), trois conférences du philosophe prononcées à l’université de Yale en 1934 et jamais traduites (140 p., 13,50 €).
L’introduction de Di Mascio, maître de conférences à l’université de Provence, est longue et passionnante. Intitulée « Dewey et le pari démocratique », elle explique le processus à l’œuvre dans Une foi commune, processus par lequel « le politique doit capter l’énergie investie dans le religieux et lui faire subir une cure de désublimation. Mais aussi, et surtout, dire que les prophètes de la démocratie ont "une foi religieuse dans la démocratie", cela signifie que le devoir de civilité qui impose le devoir moral d’expliquer à autrui les principes que l’on défend, s’appuie non pas sur un socle de morale publique, sur une religion civile ou un catéchisme, mais sur un espoir quant à l’avenir et que l’individu s’engage à faire advenir. Telle est la signification profonde d’Une foi commune : la démocratie est une prophétie autoréalisatrice ».
Vincent Duclert
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