Vous êtes sur BLOGS > le blog des livres

 

11 novembre 2010 |

Les armes et la chair

Blog st 
Stéphane Audoin-Rouzeau a beaucoup œuvré, avec d’autres dont Jean-Jacques Becker et Annette Becker, à la création de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne. Explorant les collections du musée, l’historien s’est confronté à l’objet, un type de source finalement assez inhabituel, tout au moins pour le spécialiste d’histoire contemporaine d’abord attaché à l’écrit et à l’image. Il a choisi trois objets de la Grande Guerre, trois « objets de mort », dont un éclat d’obus provenant de l’explosion du « corps » (de l’obus), projeté à une vitesse extrême, déchiquetant les chairs s’il atteint un combattant, causant des blessures mortelles par hémorragie abondante « en raison d’une capacité vulnérante spécifique les conduisant à entailler le système vasculaire sur leur passage », ou bien séparant les membres, ouvrant les corps. Stéphane Audoin-Rouzeau restitue l’aveu du peintre Fernand Léger : « A tous ces ballots qui se demandent si je suis ou serai encore cubiste en rentrant, tu peux leur dire que bien plus que jamais. Il n’y a pas plus cubiste qu’une guerre comme celle-là qui te divise plus ou moins proprement un bonhomme en plusieurs morceaux et qui l’envoie aux quatre coins cardinaux ».

Observer les objets de mort, les interroger dans leurs usages et leurs fonctions, c’est comprendre toute la guerre, sa brutalité sans nom. « L'objet a cette vertu de subvertir un peu cette forme de sécurité qui caractérise si souvent le travail historien », observe Audoin-Rouzeau dans Les armes et la chair (Armand Colin, coll. « Le fait guerrier », 175 p., 19,50 €).

Vincent Duclert

 

Réagir / Réactions

Commentaires

Flux You can follow this conversation by subscribing to the comment feed for this post.

L'utilisation des commentaires est désactivée pour cette note.