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15 septembre 2010 |

Changer la vie

Blog luc
Dans les années qui ont précédé la mise en service du Grand collisionneur de hadrons du CERN, plusieurs citoyens américains ont tenté de faire interdire celle-ci par la voie judiciaire. Motif : les collisions très énergétiques entre protons et antiprotons qui s'y produiraient risquaient de faire apparaître un micro trou noir, qui grossirait alors de façon incontrôlable en absorbant tout son environnement, planète Terre et système solaire compris. Ce n'était pas de la blague, et des physiciens réputés ont dû réaliser des calculs afin de démontrer l'inanité de cette hypothèse. L'énergie des collisions, très grande à l'échelle des particules, n'est tout de même pas si importante à la nôtre, et surtout elle est rapidement dissipée par la production de nouvelles particules et le mouvement de celles-ci.

De la même façon, Robert J. Sawyer avait imaginé en 1999 qu'une expérience avec le Grand collisionneur pourrait avoir des répercussions globales. Celle-ci déclenche en effet pendant quelques minutes un « saut en avant » d'une trentaine d'années pour l'humanité entière : chacun vit par anticipation ce qui lui arrivera un jour précis de 2030. A cela deux conséquences : de nombreuses catastrophes dans le temps présent pendant ces quelques minutes d'absence (accidents de la route, chutes, …) ; et la connaissance de l'avenir. L'histoire suit les physiciens responsables de l'expérience dans leur enquête pour comprendre ce qui s'est passé, et comment un tel phénomène a pu se produire. C'est aussi l'occasion de débats sur le libre arbitre : si on peut voir l'avenir, peut-on le changer? La question préoccupe bien entendu ceux qui n'ont pas eu de vision (et qui en concluent qu'ils seront donc morts 30 ans plus tard). Mais aussi ceux qui ont une une vision ne correspondant pas à leurs espérances (au lit avec une autre femme que celle qu'ils comptent épouser par exemple) : doivent-ils y renoncer? Ou au contraire tout faire pour modifier le cours de l'histoire?

Le récit est bien mené, avec assez de personnages et de phénomènes secondaires pour lui donner de l'épaisseur. Le milieu des physiciens, au CERN et dans les autres grands laboratoires que l'on visite, est aussi crédible, même si la physique elle-même n'a pas grand chose à voir avec la réalité. Les « expériences » du CERN ne ressemblent en effet pas à des « événements » expérimentaux, mais plutôt à de longues périodes durant lesquelles les détecteurs enregistrent des données dans des conditions définies par les physiciens. Et il n'y a pas d'instant de la découverte, mais un long processus d'analyse de ces données, dont la valeur cumulative et statistique fait seule foi.

Luc Allemand

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