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29 décembre 2009 |

Une île perdue

Blog warren
Je serais bien surpris que les droits d'adaptation au cinéma de Fragment de Warren Fahy (Editions Jean-Claude Lattès, 2009, 464 p., 19,50 €) n'aient pas déjà été négociés. Le thème fait partie des classiques des rencontres entre science et fiction : le monde perdu. Au milieu du Pacifique, une île de quelques kilomètres carrés n'a jamais été explorée par l'homme. Elle abrite une faune pour le moins étrange, et dangereuse. Mais les explorateurs iront de surprise en surprise.

Le lecteur est bien tenu en haleine par des rebondissements incessants ; les héros intrépides s'en sortiront, laissant toutefois sur le carreau nombre de leurs compagnons ; le méchant, guidé par son intérêt égoïste, sera bien puni ; et la conclusion est assez elliptique pour ménager la possibilité d'une suite. Du classique!

Plus original, mais très à la mode ces derniers temps, la présence de la télé-réalité : la découverte de l'île est en effet due au passage d'un voilier qui emporte les candidats et l'équipe d'une émission de télé-réalité à relents scientifiques. C'est le prétexte à la présence sur place de quelques biologistes, dont certains ne résistent pas longtemps aux assauts d'une nature isolée depuis le Précambrien. La découverte se fait ainsi sous l'oeil de la télévision, en direct. Et l'armée, qui intervient rapidement, a bien du mal à imposer le black-out.

Surtout, ce roman vaut par sa réelle proximité avec les théories évolutionnistes. On a un peu de mal au départ avec les exposés de Geoffrey Binswanger, sur l'origine du sexe ou sur les relations entre la mort et la plus ou moins grande socialité des espèces. Mais les idées essentielles sont très habilement mises en situation dans les découvertes de terrain. Et les réflexions des biologistes qui, disséquant une espèce nouvelle, tentent de la rapprocher d'une classe connue, sont assez réalistes (même si ce type de raisonnement s'étire généralement sur des temps beaucoup plus longs).

Bien sûr, les héros sont présentés comme un peu trop géniaux : tous les chercheurs ne sont, heureusement, pas obsédés par leur activité scientifique depuis l'enfance. Et le seul qui soit un peu besogneux en a conçu tant d'amertume qu'il devient un meurtrier, et qu'il ne recule pas devant le génocide!

Mais la faune extraordinaire de l'île est vraisemblable, et l'idée d'une réduction progressive du territoire (donc de l'existence d'une histoire complexe qui nous échappe) permet d'accepter les zones d'ombre sur la façon dont un écosystème si agressif a pu se perpétuer. Enfin, la réflexion sur le rôle de l'homme dans cette évolution est bien placée comme l'un des ressorts dramatiques, sans lourdeur excessive, et sans trop donner de leçons. Dans la « lutte pour la survie », il n'y a pas besoin de réfléchir beaucoup pour décider de ses actions.

Luc Allemand

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