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août 2008

05 août 2008

Collection "Uchronie"

Blog_uchro_3 Il y a deux ans, Pyrémonde, éditeur plutôt spécialisé dans les publications « régionalistes », inaugurait sa collection « Uchronie » par une très belle réédition de l’ouvrage éponyme de Charles Renouvier, suivi l’année dernière du Napoléon apocryphe de Louis-Napoléon (sic !) Geoffroy-Chateau, sans doute la première œuvre du genre. Après ces deux classiques incontournables (cf. Le détroit de Behring d’Emmanuel Carrère, réimprimé récemment), la collection prend vraiment son essor avec la parution en avril dernier de deux ouvrages plus marginaux, mais qui illustrent bien la diversité du genre. Ces deux titres, très différents par leur destination et leur ton, ont en commun l’obsession pour les implications militaires de la technologie, qui caractérise nombre d’uchronies.

Blog_uchro_1 Comment la France conquit l'Angleterre en 1888 d’Henri Buchard (2008, 96 p., 11,95 €), paru pour la première fois en 1891, est la traduction d’un Kriegspiel (« jeu de guerre ») censé démontrer la suprématie de la torpille sur le cuirassage des vaisseaux de guerre, qui illustre ce que l’uchronie peut véhiculer de ressentiment contre les revers de l’Histoire (ici la toute-puissance de la « perfide Albion » dans le combat naval).

Blog_uchro_2 Moins aride et plus plaisant, L’Aviateur de Bonaparte, roman-feuilleton de 1926 de Jean d’Agraives (livre I, 2008, 238 p., 23,5 €) représente une variation uchronique qui a fait depuis florès parmi les auteurs de SF : l’introduction d’un progrès technique ou scientifique antidaté, que l’on retrouve récemment dans Les conjurés de Florence, de Paul McAuley ou La cité de Satan de Fabien Clavel, entre autres. Espérons que le catalogue s’enrichira encore de raretés et autres curiosités endormies dans le purgatoire des bibliothèques ! Il suffit, pour prendre la mesure de l’ampleur du champ à explorer, de consulter la somme bibliographique d’Éric Henriet, L’Histoire revisitée (Encrage/Les Belles Lettres, 1999, rééditée et actualisée en 2004).

Ivan Kiriow

04 août 2008

La chasse aux enfants

Blog_chasse La tradition d’engagement des philosophes dans la défense des principes de démocratie a été reconnue classiquement, comme quand Georges Canguilhem rendit hommage à la résistance de Spinoza à l’ « Ultimi barbarorum » à La Haye en 1672 : « Spinoza a pris parti publiquement pour le droit à la liberté de penser. Ami de Jean de Witt, Grand pensionnaire de Hollande, dont il partageait les convictions républicaines, il a été le témoin de son assassinat par des émeutiers orangistes, à la Haye, en 1672, quand les armées de Louis XIV ont envahi la Hollande.

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01 août 2008

Les enfants de la post-modernité

Blog_otaku Les éditions Hachette Littératures traduisent pour la première fois en France l’étude du phénomène « Otaku » réalisé par le philosophe japonais Hiroki Azuma (Génération Otaku, les enfants de la post-modernité, 189 p., 18€). Le terme Otaku recouvre l’ensemble des personnes qui se passionnent pour la bande dessinée, le dessin animé, les jeux électroniques, la science fiction – ainsi passés au crible de l’analyse. L’ouvrage propose des pistes d’interprétation de cette culture « Otaku », plus généralement symbolisée notamment par le phénomène Manga considéré comme représentatif des jeunes post-modernes. Du reste, comprendre la société japonaise sans prendre en considération la culture Otaku serait une erreur. Cette analyse permet en retour de s’initier et/ou de mieux saisir ce phénomène qui s’exporte aujourd’hui en Europe et en France. Souvent connoté négativement – le terme Otaku étant associé à l’idée de la perversion et de la déviance sociale dans les années 1970, l’aversion tend désormais à se transformer par un engouement positif signe du postmodernisme : perte de repères, critique sociale, violence et espoir d’un autre monde. Le manga n’est pas que violent et il est loin d’être réservé aux enfants. Ce sont des idées reçues. On lit Jiro Taniguchi et son Quartier Lointain, on se passionne pour les aventures du docteur Tenma dans Monster de Naoki Urasawa ou plus récemment de The 20th Century Boys et ses visions apocalyptiques, d’autres apprécieront la réflexion sociale de Battle Royale de Takami et Taguchi. S’agit-il d’un simple phénomène de mode ? Le philosophe invite à une réflexion sur ce qu’il considère comme un véritable phénomène de société qui touche toutes les classes sociales et toutes les générations grâce à un prix bon marché et à la diversité des sujets abordés. A Paris, les librairies spécialisées prolifèrent, les Fnac parisiennes proposent elles aussi ses rayons pour nous faire découvrir le meilleur de la diversité des mangas que l’auteur considère comme porteur d’un espoir : celui de « permettre l’avènement d’un nouvel âge qui autoriserait une critique plus indépendante et plus riche » (p.186). J’en profite ainsi pour recommander aux (futurs ?) amateurs de mangas la lecture de L’homme sans talent de Yoshiharu Tsuge qui nous raconte le parcours désabusé et ironique d’un mangaka – un auteur de manga …

Lynda Sifer Rivière, EHESS (Cermès)