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mai 2009

27/05/2009

Planck va bien, et rendez-vous en septembre

Voila, la fievre est (un peu) retombee.

Planck est en route pour L2, tout se passe nominalement jusqu'a present. Les divers etages de refroidissement vont se mettre en route les uns apres les autres pendant les prochaines semaines. Le prochain moment cle de la mission est le la mise en route du refroidissement a 0.1K. Cela devrait se passer fin juin. Suivront ensuite une phase de tests et d'etalonnage. La, on saura les performances precises des instruments. La mission scientifique de Planck, a savoir le releve du ciel, commencera
a proprement parler debut aout par un petit echantillon donnees que nous pourrons d'ores et deja analyser.

Nous vous donnons donc rendez vous en septembre pour suivre en direct ce moment particulier dans la vie de Planck (et dans la notre). D'ici la, nous aurons du pain sur la planche: participer aux equipes de surveillance de Planck, ecrire des Habilitation a Diriger des recherches, faire des demandes de financements, presenter nos recents resultats dans des conferences, finaliser l'appel d'offre de l'ESA pour les futures satellites de cosmologie, encadrer des stages d'etudiants de Licence et Master, preparer les cours de l'annee prochaine ... et prendre quelques vacances !

Nabila, Marian, Herve

17/05/2009

Félicitations primo-ministerielles contenant une grossière erreur

Le premier ministre félicite les équipes de Planck et Herschel (voir ici le communiqué officiel). C'est heureux que les plus hautes sphères de l'état reconnaissent l'investissement humain, scientifique, technologique et financier du projet qui a, rappelons-le, débuté il y a plus de 15 ans.

Cependant, à lire de plus près, la dernière ligne du communiqué indique, je cite : "Planck a été conçu pour mesurer au millième de degré près les fluctuations de température du rayonnement fossile [...]".

Aie ! Les fluctuations de températures du fond cosmologique sont de l'ordre de la dizaine de micro-Kelvin (c'est-à-dire environ 10^-5 K ou encore un centième de millième de degré). Si, comme notre premier ministre l'écrit, Planck ne pouvait mesurer que le "millième" de degré, notre cible étant 100 fois plus faible, nous n'irions pas bien loin: tout au plus pourrions-nous mesurer notre Galaxie et le dipôle cosmologique...

Un peu comme un gardé à vue (donc supposé innocent), tentons d'être bienveillant envers ce communiqué. J'ai peut-être compris de travers, il s'agissait peut-être d'un degré d'angle, et non pas de degré Celcius ou Kelvin, de température ? L'erreur aurait été aussi grossière, puisque Planck observera avec une résolution angulaire de l'ordre de quelques minutes d'arc (disons 4 minutes d'arc), ce qui donne 7 centièmes de degré d'angle, soit environ 70 fois plus que le fameux "millième de degré près".

Se tromper d'un facteur 100 (ou 70) est grave en science, et c'est l'une des premières choses que l'on enseigne à nos étudiants arrivant en L1: avoir en tête les ordres de grandeur.

Espérons que les services du premier ministre (et le conseiller ayant écrit le communiqué, et qui a oublié le "onni" de "millionnième" pour le transformer en "millième" par erreur) manient les budget de l'état a mieux qu'un facteur 100... Peut-être pourrais-je essayer de me tromper aussi, d'un facteur 100, sur ma déclaration d'impôt ?

Cette grossière erreur, dans un communiqué officiel, semble traduire, malheureusement, une dégradation de la culture scientifique chez une partie de nos politiques et journalistes généraux (pas à la Recherche, of course ;-) ). Quelles horreurs n'avons-nous pas entendu dans les médias à propos de Planck ? (qu'il allait aussi détecter des planètes, sur France 2, parait-il). Sans parler de nombreux épisodes précédents, je pense en particulier à cette histoire éloquente d'adolescent qui avait "découvert" une comète, soit-disant confirmée par la NASA en février 2006, et qui avait fait la une. Dommage que la culture scientifique fasse si peu partie de la culture, sinon de tels errements auraient moins lieu. Peut-être devrais-je postuler pour donner des cours à Sciences-Po ? ;-)

On le voit, les fronts sont multiples: proposer, construire, tester, envoyer des satellites de haute technologie comme Planck et Herschel (ou d'autres équipements scientifiques), enseigner la démarche scientifique à nos étudiants, mais aussi diffuser cette fructueuse démarche scientifique dans la société, par des procédés divers (conférences, écoles, rencontres, articles, blog, etc..). Vaste tache, pourtant essentielle. Pour qu'une erreur d'un facteur 100 ne puisse plus choir et demeurer dans un communiqué de presse de la République.

[désolé d'avoir un peu divergé du thème Planck Herschel, mais cela me touche et m'énerve]

Hervé Dole

16/05/2009

Théatre et bolomètres vivants

Des collègues (dont notre Nabila, mais aussi Mathieu, Karine, Gilles, Nathalie, Marie, et d'autres) de la "compagnie du ciel" ont joué ce soir "le conte d'hiver" `à Orsay: merveilleuse représentation !

Francois Pajot m'a appelé de Kourou cet après-midi, pour m'annoncer une grande nouvelle: les détecteurs de Planck HFI (les fameux bolomètres) ont été "allumés" cet après-midi, et tous répondent ! Ca parait naturel, mais nous sommes soulagés.

Lors du lancement, les vibrations et les accélérations sont telles, qu'il n'est pas rare d'avoir quelques dégâts. J'ai bien connu cela avec Spitzer (satellite infrarouge de la NASA, sur lequel j'ai travaillé plusieurs années, alors en Arizona, puis à mon retour à Orsay), au décollage de la Delta II en Aout 2003 (de Cocoa Beach en Floride en pleine nuit : c'était fantastique). Nous avions perdu la moitié d'une caméra révolutionnaire observant à 70 microns de longueur d'onde. La faute: un câble cassé, dans la partie de l'instrument ou la température est de 1.6K. Le design était tel que la rupture d'un câble ne pouvait pas rendre inopérante la totalité des caméras. Certes. Mais la moitié, si... Ca a donc fait mal de savoir, après le succès du lancement, que notre programme scientifique allait être amputé de moitié à cause de ce fichu câble... Cela est du passé, nous nous en sommes très bien sortis, mais cela illustre à quel point le lancement est critique, et pourquoi les tests en vol sont important, afin de bien vérifier l'état des systèmes la-haut, pour quantifier les performances.

Donc, tous les bolomètres répondent. C'est une fantastique nouvelle, puisqu'elle nous dit que, actuellement, Planck HFI est au mieux de sa forme, ce qui est de très bonne augure pour la suite ! A ce stade, nous savons qu'il n'y a aucune dégradation ou sous-performance quelconque. Youpi !

Les "opérations" continuent, c'est-à-dire les tests et ajustements. Pour Planck HFI, je crois qu'il y a environ 2 semaines de "calme" maintenant, puisqu'il faut laisser le télescope refroidir. Ensuite commenceront d'autres choses sérieuses, relatives au refroidissement de Planck/HFI.

Hervé Dole

15/05/2009

La douce euphorie continue

A la suite d'un message (email) de Jean-Loup envoyé à toute la fac annonçant le succès du lancement (message qui vient juste d'être distribué), nous recevons une avalanche de messages de félicitations, tous émouvants et poignants. C'est formidable de sentir toute une communauté de personnes suivre et se réjouir du succès de la manip, au service de la connaissance. C'est un peu comme sur ce blog, ou vos messages témoignent de votre grand intérêt et curiosité (sans compter le grand nombre de connexions, qui exprime probablement un intérêt à cette partie importante de l'aventure).

Parmi les messages émouvants, un collègue indique en substance qu'il ne nous connait pas, mais en tant qu'expérimentateur il connait les joies et les difficultés du métier et la tension inhérente, et nous félicite très chaleureusement; il se réjouit des apports futurs à la communauté scientifique nationale et internationale de Planck et Herschel.

Une autre, qui était avec nous, nous écrit par la suite qu'elle a rarement été aussi émue que lorsque Planck a été finalement séparé de Herschel puis du SYLDA. Tout comme nous !

Que ce succes et ce soutien nous emeuvent ! Quelle formidable démonstration du savoir faire de centaines de personnes (chercheurs, ingénieurs, techniciens, administratifs, des labos, agences, industriels) qui se dévouent sans compter pour le succès scientifique de Planck et Herschel (et sans mentionner ici les autres manips de par le monde, grandes ou petites).  Et quel contraste avec le mepris de la recherche affiche en haut lieu ces derniers temps.

Hervé Dole

Les nouvelles sont bonnes / commentaires

Ce matin, j'ai eu droit a un cours particulier de Guy Guyot et Gilles Poulleau pour analyser les premières courbes en direct provenant des thermomètres et autres détecteurs de pression, de débit etc. C'était fascinant. Tout se déroule bien ! C'est impressionnant de suivre l'état de l'instrument à si grande distance, de suivre la température de tous les systèmes, la pression de l'Hélium dans les sphères et dans les tuyaux, "comme si la manip était dans le bâtiment à côté de nous, comme c'était le cas durant les tests" plaisante Guy.

Pour répondre à quelques commentaires (que l'on apprécie beaucoup!)

- nominal veut dire que tout se déroule bien, et en accord avec les prédictions;

- les données du satellite arrivent dès hier ; mais les données utilisables pour la science ne commenceront a arriver qu'une fois le télescope et l'instrument froids (ils sont encore trop chauds), soit dans environ 2 mois; Mais ensuite il faudra 6 mois pour un premier relevé du ciel;

- cette période de 2 mois servira à effectuer de nombreux tests

- 6 mois pour observer le ciel tout entier (en faisant un tour par minute), parce que la Terre parcourt une demi-orbite pendant ce temps, ce qui laisse le temps de voir toute la voute céleste;

- il faut plusieurs relevés (4 ou 5) car plus on a de données, meilleur sera la mesure finale (puisque le bruit diminue quand on "accumule" plus de données). De plus, cela permet de soustraire de nombreux effets systématiques et/ou instrumentaux, puisqu'on aura plusieurs mesures indépendantes prises à des moments différents

- les données seront gardées précieusement par le consortium Planck pendant 1 an à l'issue de la mission pour laisser le temps de bien traiter les données; ensuite les données seront complètement publiques, téléchargeables par tous ! Vous pourrez voir la totalité du ciel, dans le domaine millimétrique. ce sera grandiose !

Hervé

Planck et la tortue

Le lancement de Planck vécu depuis Kourou avec Guilaine :

"Ouhlala, quelle émotion. C'est indescriptible en fait. Trop fort. On était sur une base assez loin du tir: 12.5km. Il y en a qui sont arrivés plus tôt et qui se sont retrouvés à 7.5km, on était un peu déçu. Mais
en fait, c'était un  site génial car la fusée a décrit une magnifique courbe devant nous. On a pu la suivre pendant au moins 40 sec. Et en plus on a pu voir le largage des boosters. Avant le tir, on s'est pris quelques bonnes draches et le ciel n'était pas très dégagé. Mais ça s'est dégagé rien que pour nous.
A H-1minute, d'un seul coup, plus personne n'a bougé. Silence complet.

Puis le décompte est arrivé,  c'était vraiment impressionnant. La fusée a joué à cache cache avec les nuages un peu au début pour après ne traverser que du ciel bleu et enfin passer devant le soleil. C'est bizarre parce qu'on a ne reverra plus jamais le satellite, mais en même temps ce n'est qu'un début. On est resté sur la base encore une bonne heure. On a suivi à la télé le largage de Planck. Après, on a eu un petit debriefing à l'hotel de Jean-Loup avec un petit punch. Et voilà. Maintenant, on suit les nouvelles comme vous.

Après toutes ces émotions, on s'est fait un petit restau au bord de la plage des tortues. Jean-Loup a préféré délaisser le grand cocktail ESA et s'est joint à nous. C'était bien sympa. On a vu deux tortues pondre. Et on a passé plus d'1h30 a "ramener" une tortue luth à l'eau (juste guider parce qu'elles font 600 kg ces bestioles). Elle avait perdu son GPS et faisait n'importe quoi. On a fait un chemin avec des rondins; on a fait bloc pour qu'elle change de direction. Ca faisait peine à voir mais ça a fini par marcher. Quelle journée!"

14/05/2009

Emotion

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Aujourd'hui le maitre mot était émotion ! Il y en a eu beaucoup, peut être beaucoup trop...
Je ne suis rentré dans le projet  Planck que tardivement (par rapport à tous les collègues de l'IAS et les autres, ce n'est pas mon bébé contrairement à certain(e)s), j'avais vu le lancement d'ARCHEOPS (une expérience de mesure de fond diffus cosmologique en  ballon stratosphérique) depuis Trapani, mais là.. là, aujourd'hui, c'était immense! En plus des jours et heures de stress qui ont précédé le lancement il y a eu ces 28 minutes de ... de vie anaérobie !  A tel point qu'après les applaudissements, l'émotion était forte, trop forte et que j'ai fondu en larmes (comme d'autres). La journée était tellement intense que je n'ai pu parler ou écrire quoi que ce soit. C'est maintenant, après quelques heures, et quelques verres, que la tension redescend et que je peux me concentrer. Le lancement: OK! la séparation : OK! la mise sous tension de HFI: OK! Que du bonheur ! Les données (d'attitude) arrivent à l'IAS (photo).  On va continuer à surveiller de prés mais on a confiance! Bonne nuit !

Marian

OD1 (Kenobi?)

Le lancement d'Herschel avec succès à 15h12 cet après-midi signale le début de l'Operational Day 1 (ou OD dans le langage codé que l'on affectionne dans le spatial). En effet la vie d'Herschel va se dérouler par cycles de 24 heures, rythmés par une période quotidienne de 2h de contact avec le satellite, aux environs de 11h30 (pour l'Europe).

Durant chaque période de contact, on récupèrera les données accumulées pendant l'OD qui vient de s'achever, et on transmettra au satellite les instructions pour l'OD qui doit démarrer 24 heures plus tard. De cette façon, même si une période de contact se déroule mal, Herschel aura toujours de quoi remplir l'OD à venir.

Évidemment pour ses premiers jours dans l'espace, nous allons garder le contact un peu plus longtemps chaque jour, non parce que couper le cordon est difficile, mais parce que les réglages qu'il y a à faire dans ces prochains jours peuvent nécessiter des réactions rapides, incompatibles avec un délai de 24 heures. Ce sera le cas le 24 Mai prochain avec la mise sous tension des instruments et les premiers tests fonctionnels.

Marc

HFI est nominal

Je harcèle Maryse de SMS et elle se prête au jeu (merci !). A 22h04 tout va pour le mieux pour HFI ! Il commence à fonctionner tranquillement. Les tests et la "descente en froid" prendront plusieurs jours/semaines, donc il ne faudra pas attendre ici de nouvelle fracassante chaque soir. Néanmoins, quelques heures seulement après le lancement, c'est formidable de savoir que tout fonctionne nominalement.

La nuit sera peut-être plus calme pour certains, sachant que notre "bébé" se porte bien, même si la route est longue pour L2, pour le survey, l'analyse des données, leur interprétation etc. Elle est en tout cas méritée pour tous, après une journée très très intense. Une de celles qu'on ne vit que quelques fois dans une carrière de scientifique. Et c'est (en partie) pour des journées comme celles-ci que l'on travaille des années durant. Et on n'a encore rien vu avec Planck : ce sera encore plus intense d'ici peu !

Hervé

So far so good

est le titre d'un SMS que Guilaine et Stéphane m'envoient de Kourou. Planck HFI se refroidit donc passivement tranquillement. Attendons la suite, mais pour l'instant tout fonctionne admirablement. Quel soulagement d'apprendre que tout va bien après 3h de déconnexion pour cause de pause familiale !

Hervé