Histoire et mémoires
La nouvelle collection « Sciences humaines/Ecritures de l’Histoire »
de La Découverte* est inaugurée par un ouvrage de Philippe Joutard, Histoire et mémoires. Conflits et alliance (344 p., 24 €). C’est une belle réussite, parce que l’auteur est l’un des
chercheurs qui s’interroge le plus sur les questions de mémoire collective et
de transmission -lesquelles ont profondément transformé les méthodes et le
métier d’historien. Le livre est à la fois très clair, bien organisé, et d’une
pensée profonde, qu’elle soit analytique ou personnelle. Philippe Joutard
restitue son propre parcours, ses recherches et ses lectures qui l’ont conduit
à élaborer une compréhension de l’histoire dans son rapport au phénomène des mémoires. Il exprime ses
dettes, à ses maîtres comme aux plus jeunes dont Ivan Jablonka, auteur d’une
prodigieuse enquête pour « retrouver » ses grands-parents qu’il n‘a
pas eus, disparus dans la Solution finale (Le Seuil, coll. « La librairie
du XXIe siècle »).
La fonction de l’historien s’éclaircit, devant le XXe siècle, « siècle des extrêmes » (Eric Hobsbawm), de l’extrême violence, de l’inhumanité extrême. « Le crime parfait ne veut laisser aucun témoin, aucun indice, écrit Philippe Joutard. Modestement, obstinément, l’historien recherche une part de vérité sans laquelle il n’y a pas d’humanité ».
Ces quelques lignes disent la gravité du livre, et sa justesse.
Vincent Duclert
*dirigée par Christian Delacroix, François Dosse et Patrick Garcia. Dans la même collection est paru un deuxième ouvrage, d’Olivier Forlin, Le fascisme. Historiographie et enjeux mémoriels (408 p., 26 €).
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