Séquence BD. Adaptation flamboyante
« Les Oulahmr fuyaient dans la nuit épouvantable, fous de souffrance et de fatigue, tout leur semblait vain devant la calamité suprême: le feu était mort ». Cette phrase ouvre la Guerre du feu, que J.-H. Rosny Aîné publia en 1911. Elle est emblématique du roman. Sans que rien ne soit dévoilé de l'intrigue, tout y est dit de la vision romantique du destin humain que le romancier y développe.
Car, en recherchant le feu, les trois héros, Naoh et ses compagnons Gaw et Nam affrontent certes, des hommes, parmi lesquels les redoutables « Dévoreurs d'hommes » et les non moins belliqueux « Nains rouges ». Mais surtout, ils affrontent la nature, animaux et éléments. C'est d'ailleurs l'objet de la première partie de l'ouvrage, qui vient de faire l'objet d'une adaptation en bande dessinée par Emmanuel Roudier (La Guerre du Feu, 1 - Dans la nuit des âges, couleurs de Simon Champelovier, Delcourt, 56 p., 2012, 14,30€).
Dans ce début
de récit, plus que l'affrontement entre Naoh, « fils du léopard », et
Aghoo, « fils de l'aurochs », qui convoitent tous deux la belle
Gammla et, indirectement, la place de chef des Oulahmr, ce sont les combats
entre animaux qui sont au cœur de l'action. Des mammouths affrontent des
aurochs près d'un point d'eau. Un lion des cavernes tue un tigre (et
s'approprie la femelle de celui-ci, peu rancunière). Chaque fois, le premier
réflexe de l'homme est de se mettre à couvert, de se barricader et d'observer.
Petit à petit, toutefois, il prend confiance. Après avoir abattu un ours pour
se défendre, les héros attaquent la tigresse, et en triomphent : ils sont prêts
pour affronter d'autres hommes, ceux dont ils découvrent les traces à la fin du
volume.
Les dessins d'Emmanuel Roudier, mis en valeur par les couleurs de Simon Champelovier, servent parfaitement le scénario. Les hommes sont craintifs et désemparés, les animaux terribles, les combats intenses, sauvages. L'auteur a, qui plus, est, fait l'excellent choix de conserver le texte original de Rosny Aîné pour les commentaires comme pour les dialogues. Même s'il a coupé des scènes, son adaptation est très fidèle à l'esprit et à la lettre. Il en a également ajouté une au début, qui fait écho à sa précédente trilogie Neandertal
http://larecherche.typepad.fr/le_blog_des_livres/2009/11/neandertal.html, avec une allusion à une alliance entre un homme et des loups.
J'avoue avoir découvert la Guerre du feu par l'intermédiaire du film de Jean-Jacques Annaud (sorti en 1981). Je n'ai lu le livre qu'ensuite. Puis j'ai revu le film. La lecture de cet album m'a procuré autant de plaisir. Et je suis retourné lire des passages du livre. Gageons que cette adaptation de Roudier fera connaître ce classique du roman préhistorique, et donnera envie de lire lire en version originale (par exemple, on le trouve gratuitement en PDF http://bit.ly/GduFeuPDF).
Sa qualité, faut-il le préciser, n'a rien à voir avec une quelconque vraisemblance. Il y a bien longtemps que les préhistoriens savent que nos ancêtres préhistoriques n'ont jamais vécu de cette façon. Mais cela ne les empêche pas de prendre du plaisir à ces aventures. J'attends le volume suivant avec impatience.
Luc Allemand
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