L’ours et l’essence pourrait être le titre d’une
fable façon Jean de la Fontaine revue à la mode de Verkhoïansk. Il s’agit de
fait de nos principaux sujets de discussions. Discussions lors de nos longs
trajets à pieds du camps de base situé dans le hameau de Targana aux différents
sites distants à vol d’oiseau de 3 à 6 km et qui nous demandent environ 90 mn matin
et soir, souvent lourdement chargés de notre matériel de fouille. Discussions
qui ont lieu aussi lors de nos courts repas, autour d’un feu de camps le midi
ou dans la cabane le soir. Lors des trajets, l’ours à notre préférence car nous
redoutons de le voir apparaître, tandis que lors de nos repas, c’est l’essence,
les pates au corned beef avec ou sans
sardines russes, mais surtout l’absence de bière (nos médicaments n’ont guère
été entamés) commençant à peser à certains.
L’ours est présent partout, d’après certains
d’entre nous il nous attendrait même ! Ses empreintes ont été vues (le
plus gros fait au moins du 48, mais le 43 semble assez fréquent) et photographiées
autour du hameau mais aussi sur notre tas de déblais. La fouille des tombes
semble l’intriguer. Le swimming club
de la Yana, fort de ses trois membres dont les bains réguliers sont de plus en
plus rapides avec une température de l’eau inférieure à 10°C à 21h, l’a entendu pêcher
plusieurs soirs durant et a vu la gerbe d’éclaboussures liée à son entrée dans
l’eau sur la rive opposée. Darya, qui avait pris l’habitude de caracoler en tête
(elle est jeune) lors de nos déplacements a été calmée par sa vue. Debout
contre un arbre, à environ 50
mètres, il se faisait les griffes. Le sprint qui s’en
suivit fut heureusement sans dommage, le vent soufflant pour elle du bon côté
et l’animal ne l’ayant pas repéré. Nous avons maintenant avec nous « la
fille qui a vu l’ours » et si les photographes espèrent bien l’avoir,
c’est selon Vassily une idée romantique à rejeter. Le danger est bien là.
Vassily est épouvanté par les ours qui l’ont déjà attaqué, l épargnant mais
blessant grièvement son compagnon d’infortune. Quant aux villageois s’ils en
voient régulièrement ils ne le chassent pas n’ayant à leur disposition que
quelques vieux fusils, assez efficaces pour le lièvre des neiges et les canards
comme nos palais ont pu le découvrir, mais totalement inefficaces pour des
animaux de cet acabit. Désormais, la marche isolée est interdite sauf à Vassili
qui se déplace avec une fusée de détresse à la main, seule arme réellement
efficace selon lui contre la bête. Elle peuple nos marches et nos imaginations.
Si l’essence est moins dangereuse pour nos vies et
beaucoup moins mythique, son absence nous pose actuellement de gros problèmes.
Non seulement il n’y en a plus dans le hameau, ce qui nous empêche de nous
faire aider par le bateau, mais elle est comptée au village distant de quatre
heures par la Yana. Le président de la région contacté par iridium (celui qui
nous permet de vous fournir ce blog) nous a assuré que la situation était la
même à Batagay, capitale régionale. L’essence n’est livrée que deux fois par
an, les réserves sont entamées et il ne semble guère question d’en apporter aux
archéologues. Ce que nous comprenons. Les dernières tombes repérées par Vassily
sont à plus de trois heures de marche, ce qui rend leur fouille impossible.
Nous avons donc décidé de déménager.
EC
Rédigé par : NICOLAS | 26/08/2010 à 04:29
Alors ça tient suffisamment chaud les sous-vêtements ODLO?