découverte Bedeilhac - interview
http://www.ariegenews.com/news-21471.html
sur ce site interview et quelques informations sur la démarche.
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La présentation du film " Les premiers Européens " se poursuit le long de la chaîne pyrénéenne.
(le 20 juillet à la Grotte de Bedeilhac (Ariège), le 21 juillet à Hasparen (Isturitz -salle cinéma Hasparen) (voir note précédente sur Isturitz - 0xocelhaya) et le 22 juillet à Boulogne sur Gesse (Haute-Garonne).(21h)
Cette région des pyrénées est est riche en site préhistoriques. Parmi tous ces lieux, deux retiennent l'attention.
Nous y avons été accueillis par la Préhistorienne Nathalie Rouquerol (Directrice Musée-forum 31420 www.aurignacien.com).
Elle a suivi le film en tant que conseillère scientifique. Spécialiste de l'Aurignacien, elle nous a fait découvrir la majesté de ces lieux et la richesse de leur Préhistoire. Le site de Lespugue est renommé suite à la découverte d'une remarquable statuette de femme (grotte des Rideaux) ; elle est datée d'au moins - 25 000 avant notre ère.
Cette Vénus de Lespugue, œuvre exceptionnelle en ivoire de mammouth, de 14,7 cm de haut, offerte par l’inventeur René de Saint-Périer au moment de sa découverte en 1922 au Muséum à Paris. Cette représentation demeure l’un des emblèmes de la préhistoire. Symbole de la féminité, de la maternité, hommage rendu à la fécondité, cette figurine aux formes généreuses et tout en rondeur représente-t-elle une divinité ?
Le massif forestier des communes de Montmaurin et Lespugue forment un ensemble archéologique unique qui a été foulé par toutes les civilisations d’Europe depuis 300 000 ans au moins.
C’est sûrement la géologie et la géographie si particulière qui sont à l’origine de cet intérêt pour les lieux depuis la nuit des temps. Au milieu des collines douces du sud de la Gascogne, émergent des falaises calcaires où la rivière La Save a peu à peu creusé son lit. S’est formé ainsi un défilé de près de 4 kilomètres jalonné de cavités. Grottes, abris et failles sont partout présentes et ont servi de refuge, campement, atelier, habitat etc.
La première occupante retrouvée, la jeune fille pré-néandertalienne de Montmaurin est connue grâce à sa mâchoire et quelques autres fragments. Elle est longtemps demeurée le plus vieux fossile humain de France avant les découvertes de Tautavel, puis Atapuerca…, avec une datation toujours mal définie entre 130 000 et 250 000 ans…
Ainsi Montmaurin et Lespugue sont mondialement connus du fait de ces découvertes. A côté de sites de surface, plus d’une trentaine de grottes et abris sont identifiés, et ont fait l’objet de fouilles depuis 1911 - les plus récentes étant les fouilles préventives du mois dernier, suite à l’ouverture d’une carrière à Montmaurin - . Toutes les civilisations du Paléolithique moyen et supérieur y ont été trouvées. Après l’occupation aux âges des métaux, puis pendant l’époque gallo-romaine, les abris restent encore utilisés. Ils deviennent forges, habitat, halte, ou encore annexe du château de Lespugue juché au sommet de la falaise.
Les gorges de la Save et de la Seygouade, son affluent, sont un petit Périgord
C'est ici que le film "Les Premiers Européens" va être présenté. La projection (* voir infra) est faite dans cette grotte prestigieuse. L'espace est grandiose et la grotte réunit un ensemble d'oeuvres datées de la période magdalénienne ( -17 000 , -13 000 environ). Ce qui frappe c'est la co-existence de plusieurs techniques de peintures et de gravures : en plus de cent années de fouilles on a découvert des bas-reliefs en argile, uniques en préhistoire, des gravures, des dessins au trait, des mains peintes, des représentations sexuelles, peintures en teinte plate ou bichromes.
Le porche monumental a attiré les chasseurs de la Préhistoire. Magnifique refuge et lieu de vie. La "caverne " s'enfonce sur plusieurs centaines de mètres avec ses stalactites qui résonnent lorsque frappés, ses parois ornées de stalagmites, la couleur de ses roches.
Cette grotte a forcé l'intérêt de nombreux préhistoriens qui tour à tour ont fait des découvertes importante pour notre connaissance de la vie et des art mobiliers ou pariétaux du magdalénien: gravures sur argiles et pariétales dans la salle terminale, bison tracé au trait noir, peintures bichromes en rouge et noir, panneau des bas-reliefs modelés sur le sol argileux ....
Cette grotte fait partie d'un réseau pyrénéen de lieux de vie au cours de cette période du paléolithique. L'étude des objets, l'analyse des style permet de reconstituer les modes de vie, les liens entre groupes, les influences.
Mardi 20 juillet
21h : BEDEILHAC
dans la grotte (Ariège).
Info et réservation : 05 61 05 95 06
Illustrer, composer, évoquer, suggérer, rythmer, scander .... créer la musique d'un film sur la Préhistoire (entre - 1,8 Ma et - 3000 ) est une véritable gageure. Nous ne connaissons rien des musiques, des mélodies chantées, jouées par nos ancêtres. Seuls nous sont parvenus quelques instruments de musique dont certains sont datés d' il y a 35 000 ans (flûtes en os de mammouth région Ulm - Souabe - Allemagne (Geissenkosterle,Hohle Fels), sifflets en phalange de renne, rhombes), puis, pour le Néolithique : sifflets, lithophones, percussions....
Ce fut donc un travail d'enquête, d'observation, d'essais et de création personnelle. Guillaume Solignat ingénieur son et compositeur nous accompagne tout au long du tournage. Chaque lieu est l'occasion de rechercher des ambiances, des sons. Il cherche ses " matières sonores", il capte, recueille. Souffle, claquement, animaux (cigales, mouches... !!!), dans les grottes un important travail est fait sur les volumes, les résonances, les bruits d'eau, les échos. On sait que les stalactites (et stalagmites) servirent de support à percussions. Leur tailles et diamètres variables offrent une multitude d'harmonies qui résonnent dans l'espace des grottes.
Des heures d'enregistrement dans chacun des pays ont permis de constituer une banque de sons qui vont servir à travailler cette "matière sonore " destinée à créer la bande son du film. Mais ce n'est pas tout !!!
Il faut imaginer les objets " instruments " qui vont permettre de composer un ensemble cohérent, adapté aux différentes séquences. Coquillages, morceaux de bois, os (de tous genres !), membranes, roseaux, eau dans pot (à différents niveaux), coquillages... tambour en bois ou terre... vont peu à peu constituer les instruments.
Car c'est une musique que le compositeur se doit de nous livrer. Il crée ses instruments, il réuni son "orchestre" et soit avec d'autres musiciens, soit sur son ordinateur, il compose.
Temps de recherches, d'essais, pistes de travail: recherche sur les souffles, les percussions, les silences... et attente des images composées par les graphistes. Car les images sont déterminantes dans ce projet. Leur charge visuelle et émotionnelle influent sur le choix de l'écriture sonore. Le compositeur doit créer des univers, des harmonies qui correspondent à chacune des périodes, respecter la place du commentaire car la voix du "speaker " est aussi musique. Plusieurs mois de recherche, d'écriture vont permettre de faire émerger une 'bande sonore" d'une belle qualité.
Voici quelques extraits des compositions.
Dans la note suivante présentation des instruments crées pour le film.
700 000 ans. C'est ce que tend à démontrer le résultat de découvertes par les équipes d'archéologues britanniques. dans le Sufolk, à Pakfield (Est GB). De nombreux outils témoignent de la présence de groupes installées au bord d'un estuaire sur une longue période. Ils ont vécu là au cours d'une période tempérée mais aussi lors d'un fort refroidissement. (hivers jusqu'à - 3 degrés Celsius). Dans un environnement de forêt boréales (tel que nous pouvons en avoir au nord de la Scandinavie) ils ont installé leurs campements et chassé.Mammouths, rhinocéros,chevaux, hyènes agrémentaient leur quotidien.
Il est intéressant de noter que aux mêmes périodes des groupes d'hommes vivaient en Espagne - voir site d'Atapuerca.
Dans le film nous évoquons la présence de groupes aux environs de -500 000 sur le site de Boxgrove (sud GB) et Swanscombe (non loin de Londres, sur la Tamise).
Il y tant à dire sur ces sites que l'on découvre et visite. Voici quelques images du site d'Isturitz ainsi qu'un extrait de musique.(infra)
Car la musique est un des domaines important lorsque l'on parle de Préhistoire. Elle fut assurément un mode d'expression privilégié.Seuls quelques instruments nous sont parvenus (rhombes.. et flûtes) des temps les plus anciens (-35 000 avant notre ère - voir note sur Hohle Fels ). A Isturitz plusieurs flûtes ont été retrouvées.
L'une datées de - 30 000 d'autres d'environ -15 000. Taillées dans un os de vautour. Lors du tournage, un musicien, meilleur connaisseur de ces flûtes, interprète, imagine, des sons, un air. Pour lui " ce lieu inspire, il est un espace où se transmettent des héritages, il crée un lien avec le passé, pourtant si proche". Voir en dessous un extrait de la prise de son dans la grotte (ingénieur son Guillaume Solignat)
Voici un extrait de l'enregistrement fait dans la grotte. (Cliquer sur le lien)
et la grotte d'Erbera.
Notre parcours le long des Pyrénées nous a conduit jusqu'en Pays Basque. Non loin de Bayonne et de la côte Atlantique, à 12 kms d'Hasparren (64), la colline de Gaztelu domine les communes d'Isturitz et de Saint Martin d'Arbérou. Sous la colline 3 grottes superposées. Magnifique.Et passionnant car ici des hommes sont venus habiter depuis au moins 80 000 ans. Néandertal élit domicile (période moustérienne jusqu'à - 45 000 puis vient Homo sapiens (Aurignacien et périodes suivantes: gravettien, solutréen, magdalénien.)
C'est vers la fin du XIXeme siècle que les grottes, exploitées pour le guano (phosphate), révèlent leur richesse archéologique. Objets sculptés, outils, pilier gravé d'animaux, murs gravés (chevaux, bisons...), séries de plaquettes gravées, de rondes bosses, de baguettes demi-rondes témoignent d'une activité intense et d'une culture affirmée. Tous ces objets permettent de rendre compte d'identités culturelles et de styles qui se développent sur plusieurs milliers d'années.
Nous sommes accueillis par la propriétaire du site: Joelle Darricau, le responsable des fouilles Christian Normand, et leur collaboratrice, Aude Labarge qui va nous faire découvrir la magie des lieux.
Lors du tournage dans les grottes nous sommes conduits dans des galeries, des diverticules où nous découvrons ici un cheval gravé à la crinière si particulière, là les points rouges, voire d'importantes surfaces colorées en ocre rouge. Il y a quelques dizaines de milliers d'années une femme ou un homme a rampé avec ses pots de peinture pour couvrir de terre rouge un mur ou un plafond. Allongé au fond d'une galerie, je ressent à la fois le poids des quelques cents mètres au-dessus de moi et la force symbolique de ce geste.
De remarquables perles ont été récemment découvertes à Isturitz. Elles sont datées d'environ -30 000 (Aurignacien ancien et archaïque). Elles sont étudiées par Randall White (New York University). Ses recherches sur les parures ont permis de mettre en évidence l'importance de cet production esthétique pour comprendre l'enjeu de la recherche dans ce domaine.
Ce site était un lieu de convergence, d'échange entre plusieurs régions limitrophes. Des groupes humains circulaient de part et d'autre des Pyrénées mais aussi jusqu'à la Dordogne. C'était aussi un territoire de chasse où les animaux canalisés par les petites vallées avoisinantes viennent buter sur la colline de Gatzelu qui barre la vallée.
Pour le film nous avons reconstitué les paysages à différentes périodes: climats de plus en plus froids, réchauffement, présence d'animaux différents: rhinocéros à narines cloisonnées, mammouths, ours des cavernes, renards bleus, mégacéros, antilope saïga... mais aussi chevaux, bovidés...
Invité par le Centre Culturel Français de Vilnius (Lituanie). Ce Centre, sous la Direction de Pascal Hanse, développe une très intéressante politique culturelle. Cet été une série de rencontres est organisée autour du thème : Territoire et Identité . C'est dans ce cadre que le film (version 104 mns) est présentée dans une salle de cinéma. il est sous-titré en lituanien. La salle est pleine. Le lendemain, rencontre avec le public et discussion.(voir le site du Centre Culturel : http://www.centrefrancais.lt et le blog riche en informations http://didzioji1.blogspot.com/)
Parler de Préhistoire c'est nécessairement aborder les notions de territoire et d'identité. C'est ce que j'ai vécu avec toute l' équipe lors de notre parcours en Europe, de notre voyages dans plus de 12 pays d'Europe. Nous avons redessiné notre perception de l'espace européen. Nous avons traversé l'Europe de long en large mais aussi en profondeur, celle du temps. Expérience forte.
Tout d'abord l'histoire de la Préhistoire est liée au cadre de son émergence: le XIXème siècle.
1) La naissance des Nations : les peuples deviennent souverains et redéfinissent leur espace et leur identité face aux anciens territoires et symboles impériaux et royaux. Les enjeux nationaux autour de la Préhistoire vont être importants: - besoin de se créer un peuple fondateur (souvent imaginaire)(Nos ancêtres les Gaulois !), - moyen d'affirmer sa supériorité car l'on pense sa nation ou même l'Europe sont le territoire d'origine de l'homme. - récupération par les nationalismes les plus exacerbés et dérives fascistes et racistes. L'espace territorial acquiert une nouvel définition, un nouvel espace symbolique s'impose.
2) La science (fille de R.Descartes) veut comprendre l'Homme et la Nature. L'explorer. Ce ne sont plus les territoires de Dieu qui sont l'objet d'étude mais les territoires des hommes. (Ch.Darwin, entre autres, marque une étape). Et les découvertes de fossiles et d'objets vont remettre définitivement en cause l'espace et le temps des hommes. Chaque découverte repousse les dates de présence des hominidés sur la planète et, pour ce qui concerne le film, en Europe. C'est une perpétuelle remise en cause des limites.Et donc des enveloppes identitaires que l'on se forge. Il a fallu accepter que plusieurs espèces d'hommes aient peuplé la planète.En Europe, Néandertal versus Homo sapiens a été un enjeu identitaire qui reste d'actualité. Et la récente découverte dans le nord de l'Europe d'une phalange a reposé la question d'une troisième espèce d'hominidés sur notre continent.
3) Le travail des Préhistoriens a partie liée avec la question de territorialité et d'identité. Leurs méthodes de découpage de l'espace de travail sur site, l'étude des objets, les conclusions sur les migrations, déplacements, échanges sont autant de moyens mis en place pour comprendre comment un groupe, un tribu, un peuple ont organisé leur territoire. Et donc comment on peut définir leur (s) identité (s). Un territoire de chasse, la présence d'objets, de fossiles, de productions artistiques, de zones d'habitations ... sont autant d'indices qui permettent de cerner des territoires.
Ce que j'ai découvert en faisant ce film c'est cette nécessaire remise en question de notre perception des notions de territoire et d'identité. La perpective préhistorique relativise les enjeux territoriaux contemporains ou ceux que l'on nous a inculqués au cours de notre scolarité. L'enseignement de la Préhistoire est de plus en plus éliminée des cursus scolaires. C'est une erreur politique et idéologique.
Main et signes