L'empire de la valeur. Refonder l'économie
Alors que la zone euro replonge une nouvelle fois dans la crise financière, il apparaît urgent de redonner au système économique des fondements solides et, pourquoi pas même, vertueux. Pour cela, explique l’économiste André Orléan dans un essai très argumenté et courageux qui fera date, il convient de lancer un vaste mouvement de connaissance de pans entiers de l’économie mondiale et de processus économiques qui restent à ce jour ignorés. « La crise l’a démontré avec éclat », souligne ce directeur de recherche au CNRS et directeur d’études à l’EHESS, déjà auteur aux éditions de la Rue d’Ulm de Penser la crise financière. De l’euphorie à la panique (2009). Mais d’ajouter aussitôt, au terme de l’introduction de L’Empire de la valeur (Le Seuil, coll. « 343 p., 23 €) : « Cependant cette exigence de refondation vaut par-delà la crise. Elle n’est nullement liée aux circonstances. Elle est une nécessité absolue si l’on veut que nos sociétés accèdent à une meilleure connaissance d’elles-mêmes. » Cette exigence de connaissance critique commence par la discipline de l’économie elle-même. Comme le souligne l’auteur dans son livre au sous-titre programmatique, « Refonder l’économie » doit s’entendre ainsi. L’examen de conscience de l’économie s’impose avant toute refondation du système économique. « Alors qu’elle aurait dû être un guide pour nos sociétés, les conduisant vers plus de rationalité et de clairvoyance, elle s’est révélée être une source de confusion et d’erreur. En son nom a été menée une politique suicidaire de dérégulation financière sans que jamais l’ampleur des dangers encourus n’ait fait l’objet d’une mise en garde appropriée. Au lieu d’éveiller les esprits, elle les a endormis ; au lieu de les éclairer, elle les a obscurcis. Le discrédit qu’elle connaît aujourd’hui auprès de l’opinion publique est à proportion de cette faillite : extrême. Face à cette situation sans précédent, face aux virulentes critiques dont ils sont l’objet, la réaction des économistes étonne par sa timidité ». Et André Orléan de situer son propos : « Le présent livre propose de rompre avec cette timidité ». C’est-à-dire de proposer une refondation de l’économie. Ce type d’ambition intellectuelle et scientifique est essentiel.
Vincent Duclert
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