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23 mars 2011 |

Survie spatiale

Blog luc arche 
Un article récent de la revue américaine Science m'apprend qu'il ne reste plus sur notre planète que 22 gibbons de l'île de Hainan. Sur cette île du sud de la Chine, la chasse et la déforestation ont progressivement repoussé ce primate arboricole dans une zone inhospitalière. Un programme de conservation a été mis en place par le gouvernement chinois, mais réussira-t-il à sauver l'espèce?

Arche de Stephen Baxter (Presses de la Cité, 2010, 596 p., 24€) pose à peu près la même question, mais à propos de l'espèce humaine. La Terre est en effet mal en point : une inondation gigantesque fait inexorablement monter le niveau des mers, repoussant l'homme vers les hauteurs. La capitale des Etats-Unis est ainsi déménagée à Denver, à un mile au-dessus du niveau de la mer (1 600 mètres), avant que cette ville ne soit elle aussi atteinte par la marée. Les réfugiés affluent, et un état policier se met en place pour les repousser et les canaliser, jusqu'à l'inévitable submersion totale, en 2044.

Dès 2025, une poignée d'hommes d'affaire richissimes ont décidé de construire une arche spatiale pour quitter la Terre et coloniser une planète plus accueillante. Les 80 futurs passagers, leurs propres enfants en premier lieu, sont préparés, formés, entraînés, pendant 17 ans avant le grand départ. La lourde charge de ces 80 individus est ni plus ni moins que de perpétuer l'humanité, sur une autre planète. Les choses ne se déroulent évidemment pas comme prévu, et ce sont finalement deux planètes sur lesquelles atterrissent des groupes humains, d'à peine vingt personnes chacun.

Une bonne partie du récit est consacrée à la préparation de ces "candidats", sur lesquels reposent les espoirs humains. Mais la suite est plus intéressante. Une fois parti, l'équipage est en effet livré à lui même, la vitesse supraluminique du vaisseau (c'est un roman de science-fiction!) empêchant tout contact, même à long terme, avec la Terre. L'enfermement et l'isolement, notamment, ont des conséquences redoutables sur l'état d'esprit des colons de l'espace, et les plus graves dangers qui les guettent ne sont pas forcément de heurter une météorite ou de rencontrer des extraterrestres. Les jeunes gens hyper entraînés du départ se transforment pour certains en roués politiciens pour obtenir et conserver le pouvoir. D'autres se réfugient dans une réalité virtuelle fondée sur leurs souvenirs terrestres pour supporter l'éloignement. Les plus jeunes, nés dans le vaisseau au cours de ce très long voyage, en viennent même à douter que celui-ci existe réellement : ne feraient-ils pas l'objet d'une expérience enterrée, plutôt que de dériver dans l'espace?

L'humanité aura bien du mal à survivre en dehors de la Terre. Telle pourrait être la morale de ce roman, s'il devait en avoir une. Et, au final, pour Stephen Baxter les groupes qui sont restés sur la planète océan ne s'en tirent pas si mal que ça.

Luc Allemand

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