La Raison humanitaire
Médecin et anthropologue, professeur à l’Institute for Advanced Study, à l'Université Paris-13 et à l’EHESS, Didier Fassin mène depuis dix ans des travaux sur les valeurs et les motivations à l’œuvre dans les engagements que l’on qualifie généralement d’humanitaires, de la lutte contre l’exclusion et la marginalité jusqu’à l’assistance aux victimes de conflits. Ces actes individuels et collectifs dressés contre la souffrance s’affirment comme un dépassement de la politique vers la morale. Bien que d’objets et de terrains différentes, ces études visaient un objectif commun, celui d’établir la nation de « raison humanitaire » gouvernant un ordre du monde où les principes de justice, d’altruisme et de compassion avaient droit de cité. Fort de cette conviction animant ses recherches, Didier Fassin les a réunies dans un volume de la prestigieuse collection « Hautes Etudes » éditée conjointement par Le Seuil, Gallimard et les presses de l’EHESS. Sous-titré « Une histoire morale du temps présent », La Raison humanitaire s’achève, au sens kantien du terme, sur « une critique de la raison humanitaire », éclairée de l’exigence d’un Michel Foucaud déclarant (dans le texte fameux, « Qu’est-ce que les Lumières ? », un commentaire lumineux d’un texte de Kant du même nom) : « La critique, c’est bien l’analyse des limites et la réflexion sur elles ».
On, le comprend, La Raison humanitaire (365 p., 21 €) vaut autant pour sa méthodologie des sciences sociales que pour son terrain moral et mondialisé.
Vincent Duclert
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