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18 septembre 2008 |

La tâche que s'assigne la poésie

Blog_bonnefoy « La conscience de soi de la poésie » est le thème du dernier numéro de la revue annuelle le Genre humain créée par Maurice Olender en 1981 (n°47, 2008, 430 p., 15 €). Celle-ci rassemble les contributions des colloques de la Fondation Hugot du Collège de France, entre 1993 et 2004. Cette livraison est doublement intéressante. D’accord par la résolution donnée par son maître d'oeuvre Yves Bonnefoy au problème qui se pose régulièrement à des chercheurs. Comment mettre en forme la matière éparse et néanmoins précieuse de colloques, séminaires, tables rondes, journées d’étude, qui portent sur un même sujet mais qu’il est nécessaire de retravailler à tel point que la possibilité d’une publication finit par s’éloigner définitivement ? Yves Bonnefoy s’en explique dans son ouverture, et, à la lecture du dossier, on comprend que ce sont tout à la fois le travail d’écriture de chacun et la pensée d’ensemble du projet qui permirent à la publication de se faire. Ensuite, par le pouvoir de la réflexion d’aller au plus profond et au plus décisif. Par exemple, avec Jean Starobinski. Dans « Jour sacré et jour profane », il constate pour commencer que « le jour est l’une des expériences fondamentales de notre existence ». Il suit alors la trace de cette expérience chez les poètes. Et il découvre que « le temps diurne et le temps sacré sont dans un étroit rapport de matière à forme. Si le sacré et profane constituent, comme les anthropologues l’affirment, une structure contrastive, quel meilleur représentant symbolique imaginer, sinon le jour de commémoration ou de fête, s’isolant dans la suite des jours. A moins que ce ne soit l’instant, s’isolant dans la suite des heures ? [...] Cette trame est aussi le fond sur lequel peut s’enlever, dans sa fulgurance ou dans sa pointe angoissée, un instant de plus haute vérité. Accueillir cet instant de vérité, lui prêter une voix : si telle était aujourd’hui la tâche que s’assigne la poésie, elle aurait fonction, dans un monde profane, d’être la gardienne du sacré. »

Vincent Duclert, EHESS

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